Divalproex chez les personnes âgées : sécurité et efficacité

Divalproex chez les personnes âgées : sécurité et efficacité
Phoenix Uroboro sept., 22 2025

Divalproex est un sels d'éthyl‑esters du valproate de sodium utilisé comme anticonvulsivant et stabilisateur de l'humeur. Chez les personnes âgées, son profil pharmacologique suscite des interrogations sur la sûreté et l'efficacité en raison de modifications physiologiques liées à l’âge.

Contexte médical et besoin d’évaluation

Les patients de plus de 65ans sont souvent traités pour des troubles épileptiques ou un trouble bipolaire. L’incidence des crises augmente avec l’âge, tandis que la tolérance aux médicaments diminue. Le valproate (composé actif du Divalproex) possède un demi‑vie allongé chez les seniors, augmentant le risque d’accumulation toxique.

Pharmacocinétique chez les seniors

Chez les adultes de plus de 65ans, la fonction hépatique est souvent réduite (déclin de 30% du flux sanguin hépatique). Le metabolisme hépatique du valproate dépend fortement des enzymes CYP2C9 et CYP2C19, dont l’activité diminue avec l’âge. Cela conduit à une augmentation du taux sérique pour une même dose, justifiant un ajustement de 25‑30% vers le bas dès le départ.

Sécurité : effets indésirables majeurs

Les événements indésirables les plus préoccupants chez les personnes âgées sont:

  • Hépatotoxicité - hausse des transaminases (ALT/AST) chez 7% des patients >70ans (étude française 2022).
  • Thrombocytopénie - réduction du nombre plaquettaire pouvant entraîner des saignements; le risque double chez les patients >75ans.
  • Somnolence et troubles de l’équilibre - facteurs de chute augmentant le risque de fractures osseuses.
  • Troubles cognitifs - diminution de la mémoire à court terme signalée dans 12% des études longitudinales.
  • Interactions médicamenteuses - le Divalproex inhibe la métabolisation de la carbamazépine, du phénobarbital et du warfarine, compliquant la prise en charge de la polypharmacie fréquente chez les seniors.

Une surveillance mensuelle des enzymes hépatiques et du compte plaquettaire est recommandée pendant les trois premiers mois, puis tous les trois mois si les valeurs restent stables.

Efficacité clinique

Dans une cohorte de 312 patients âgés atteints d’épilepsie focale, 68% ont atteint une réduction de >50% du nombre de crises avec Divalproex à une dose moyenne de 750mg/jour. Pour le trouble bipolaire, un essai multicentrique (2021) a montré que 55% des patients >65ans maintiennent une stabilité de l’humeur pendant 12mois, comparable aux résultats observés chez les adultes plus jeunes.

Comparaison avec une alternative courante : Lamotrigine

Comparaison Divalproex vs. Lamotrigine chez les seniors
Critère Divalproex Lamotrigine
Dose initiale (mg/j) 250‑500 (ajustement ↓30%) 25‑50 (titration lente)
Risque hépatique Modéré‑élevé Faible
Thrombocytopénie Oui (≈10%) Rares
Interactions majeures Nombreuses (warfarine, carbamazépine) Peu d’interactions
Efficacité épilepsie 68% réduction crises 60% réduction crises
Efficacité trouble bipolaire 55% stabilité 58% stabilité

Le choix entre les deux dépend du profil d’adversité du patient : la lamotrigine est privilégiée lorsqu’il y a antécédents de maladie hépatique ou de polypharmacie lourde.

Recommandations de dosage et suivi

Recommandations de dosage et suivi

  1. Commencer à 250mg/j; augmenter par 250mg toutes les 2 semaines jusqu’à 750mg/j, en fonction du taux sérique.
  2. Mesurer les concentrations plasmatiques valproïque 2h après la dose; viser 50‑100µg/mL.
  3. Surveiller les transaminases (ALT/AST) et le nombre plaquettaire chaque mois pendant les 3 premiers mois.
  4. Ajuster la dose en cas de chute du poids >5% ou de signes de toxicité.
  5. Évaluer la fonction cognitive tous les six mois à l’aide du Mini‑Mental State Examination (MMSE).

Ces étapes permettent de minimiser les risques tout en maintenant une efficacité thérapeutique.

Gestion des interactions et de la polypharmacie

Chez les seniors, la polypharmacie touche plus de 60% des patients. Le Divalproex peut augmenter les concentrations de médicaments à courte demi‑vie (ex.: lévodopa) et diminuer l’efficacité d’anticoagulants en inhibant la CYP2C9. Il est recommandé de :

  • Faire un inventaire complet de tous les traitements avant l’initiation.
  • Utiliser des outils d’interaction clinique (ex.: bases de données hospitalières).
  • Réduire ou substituer les médicaments à risque élevé (ex.: remplacer le warfarine par un anticoagulant direct si possible).

Cas pratique : Mme Bernard, 78ans

Madame Bernard, atteinte d’épilepsie focale depuis 10ans, présentait des crises partielles fréquentes malgré la carbamazépine (400mg/j). Son médecin a introduit le Divalproex à 250mg/j. Après 4semaines, le taux sérique était de 85µg/mL, les ALT étaient normales, mais le nombre plaquettaire était à 110×10⁹/L (légère baisse). Le dosage a été augmenté à 500mg/j, les crises ont disparu, les paramètres hépatiques sont restés stables, et la patiente n’a signalé aucune gêne d’équilibre. Ce scénario illustre l’importance d’une montée progressive et d’une surveillance étroite.

Perspectives et recherches en cours

Des essais cliniques (phaseIII, 2024‑2026) évaluent l’association du Divalproex avec des inhibiteurs de la monoamine oxydase chez les patients gériatriques bipolaires résistants. Les premiers rapports suggèrent une amélioration de la stabilité de l’humeur sans aggravation hépatique, mais la taille d’échantillon reste limitée. Par ailleurs, les pharmacogènes (gènes CYP2C9*2, *3) sont étudiés pour personnaliser le dosage chez les seniors.

Conclusion pratique

Le Divalproex demeure une option efficace contre les crises épileptiques et les épisodes maniaques chez les personnes âgées, à condition d’ajuster la dose, de surveiller les fonctions hépatiques et hématologiques, et de gérer la polypharmacie. La lamotrigine représente une alternative plus sûre pour les patients à risque élevé d’hépatotoxicité. Un suivi individualisé basé sur des mesures plasmatiques et cliniques assure le meilleur compromis entre sécurité et efficacité.

Foire aux questions

Foire aux questions

Le Divalproex est‑il approuvé pour les patients de plus de 80 ans ?

Oui, l’Agence française de sécurité du médicament (AFSSAPS) autorise le Divalproex chez les patients >80ans, mais recommande un dosage initial réduit à 250mg/j et une surveillance hépatique stricte.

Comment différencier une toxicité hépatique d’une élévation bénigne des transaminases ?

Une élévation modérée (< 3 fois la limite supérieure normale) sans symptômes est souvent transitoire. En revanche, une hausse >5 fois la norme associée à fatigue, nausées ou jaunisse indique une toxicité nécessitant l’arrêt du traitement.

Quel est le délai recommandé avant de changer de traitement si les effets indésirables persistent ?

Si les ALT restent >3 fois la normale ou que le nombre plaquettaire descend sous 100×10⁹/L après 2semaines de suivi, il faut envisager un basculement vers un autre anticonvulsivant.

Le Divalproex augmente‑t‑il le risque de chute ?

Oui, la somnolence et les troubles de l’équilibre sont signalés chez ~12% des seniors. Une évaluation de la marche et l’adaptation du domicile (barres d’appui) sont conseillées.

Comment ajuster la dose en cas d’insuffisance rénale ?

Le valproate est principalement métabolisé par le foie; l’insuffisance rénale modérée n’impacte pas fortement la clairance. Toutefois, chez un GFR <30mL/min, il est prudent de ne pas dépasser 500mg/j et de contrôler les taux plasmatiques.

Existe‑t‑il une interaction notable avec les antidépresseurs tricycliques ?

Le Divalproex peut augmenter les concentrations plasmatiques des tricycliques, accentuant les effets anticholinergiques. Une réduction de 25% du dose de l’antidépresseur est souvent recommandée.